Article 19 (article R.4127-19 du code de la santé publique) du code de déontologie et ses commentaires.
"La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale."
Publicité et commerce sont indissociables et nécessitent une analyse pratique.
1. Exercice non commercial
La santé n'est pas un bien marchand. L'acte médical ne peut pas être considéré comme une denrée, une marchandise échangée pour une contrepartie financière. Le médecin ne "vend" pas des ordonnances ou des soins, ou des certificats. La médecine est un service. Le "contrat de soins" qui est à la base de la responsabilité médicale ( art. 69 ) n'est pas une convention commerciale, ni un marché. C'est un contrat tacite, où ce qu'apporte l'un n'est pas l'équivalent de ce qu'apporte l'autre. Le médecin s'engage à donner les soins adéquats ( art. 32 ) qui ne sont pas définis par avance et qui diffèrent selon les circonstances. Cette notion- que l'exercice de la médecine ne peut être assimilé à une activité commerciale- a une grande importance et de nombreuses conséquences réglementaires. Elle ne renferme aucun jugement péjoratif vis-à-vis des professions commerciales qui ont leurs propres règles. Mais les missions du médecin sont d'une autre nature. S'il n'est pas immoral que le gain soit le moteur d'une entreprise commerciale, la rentabilité ne peut être l'objectif principal du médecin. Il n'en reste pas moins que le médecin doit trouver une juste rentabilité de son cabinet médical, nécessitant une rigueur qui évite deux écueils : la rentabilité à tout prix par un fonctionnement abusif, le déficit compromettant à terme l'ensemble de la structure de soins. S'il s'agit de gérer raisonnablement la structure de l'ensemble des moyens matériels de son cabinet (au besoin dans le cadre d'une SCM), il ne peut en aucun cas s'agir d'exploiter un appareillage- dont parfois l'originalité ou l'usage se révèle discutable- afin d'en dégager des revenus non justifiés médicalement (mais que ne manquent pas de souligner les publicités de certains journaux médicaux). Une attention analogue doit être portée par le médecin à l'utilisation de certains équipements dont l'établissement hospitalier cherche la rentabilité, voire le rendement. La cession d'un cabinet médical à un successeur par un médecin qui cesse d'exercer ou qui change de résidence professionnelle doit s'effectuer selon des règles strictes. Elle n'est pas comparable à la cession d'un fonds de commerce. La clientèle du médecin n'est pas en effet un "objet de commerce". Le médecin ne peut en disposer, on ne "vend" pas une clientèle médicale. La jurisprudence reconnaît une valeur patrimoniale au cabinet médical mais seuls peuvent être cédés les droits corporels (local, meubles, instruments...) et les droits incorporels (présentation à la clientèle, droit au bail, engagement de ne pas se réinstaller...).
2. Dérives commerciales de l'exercice
a) L'application des lois médico-sociales a apporté des habitudes et des dispositions incitant à des comportements de nature mercantile :
- le paiement comptant de chaque acte médical, conséquence de l'emploi des feuilles de maladie ;
- la tarification des actes médicaux, chaque acte étant doté d'une "valeur marchande" ;
- la nomenclature des actes médicaux elle-même, qui fait la part belle aux actes techniques et au maniement d'instruments ou des appareils.
L'influence des médias, principalement de la télévision, a affecté la relation médecin-malade en privilégiant le spectaculaire (la technique, l'appareillage, l'image) par rapport à la relation, la réflexion, le conseil. Le patient réclame l'examen paraclinique, aggravant les dépenses d'assurance maladie et le médecin est tenté de limiter son activité intellectuelle. Apparaissent ainsi des pratiques médicales de plus en plus limitées et de ce fait spécialisées (endoscopie, cathétérisme, enregistrement de données). Certaines sont plus rémunératrices et font de ce fait apparaître des "créneaux" de rentabilité qui ouvrent la voie à des excès. Dans les situations de concurrence d'origine diverse, la déontologie du médecin doit se résumer, non sans difficultés, à privilégier l'intérêt du malade.
b) Le code de déontologie a multiplié les mesures réglementaires contre une pratique commerciale de la médecine qui font l'objet d'autres articles :
- 22 , 94 : interdiction du partage clandestin d'honoraires ;
- 23 : interdiction de tout compérage ;
- 24 : interdiction de ristournes, commissions, avantages ;
- 25 : interdiction de consulter dans des locaux commerciaux ;
- 57 : interdiction de détournement de clientèle ;
- 67 , 53 , 54 , 55 : relatifs aux honoraires ;
- 87 , 88 , 89 : interdisant l'assistanat et la gestion de cabinet ;
- 92 , 97 : concernant la rentabilité.
c) La loi elle-même (voir note 1) est venue confirmer l'interdiction pour les médecins de recevoir des avantages en nature ou en espèces, directement ou non, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits remboursés par les régimes obligatoires de sécurité sociale ( art. L.4113-6 du code de la santé publique, ancien art. L.365-1 ). Cette interdiction ne s'applique pas aux activités de recherche, aux manifestations scientifiques, voire promotionnelles, à la condition qu'elles fassent l'objet d'une convention soumise avant son application au conseil de l'Ordre, que les avantages ou l'hospitalité soient raisonnables, accessoires et ne concernent que le médecin lui-même. Les infractions à l'article L.4113-6 du code de la santé publique (ancien art. L.361-1 ) sont passibles d'une amende de 500 000 F et d'un emprisonnement de deux ans. Ces dispositions ont eu le mérite de faire prendre conscience aux médecins du risque insidieux de perte de leur indépendance du fait de pratiques coutumières devenues au fil du temps plus conséquentes et davantage répréhensibles. 3. Procédés directs et indirects de publicité . Ainsi qu'il est précisé dans les articles 13,19,20, toute "réclame" est interdite, qu'elle émane du médecin lui-même ou des organismes auxquels il est lié directement ou indirectement, ou pour lesquels il travaille (établissements hospitaliers, "centres", "instituts", etc.). Sa participation à l'information du public doit être mesurée ( art. 13 ), et la personnalité du médecin, qui peut valoriser le message éducatif, doit s'effacer au profit de ce message sans s'accompagner de précisions sur son exercice (type, lieu, conditions). Sont par ailleurs interdits la distribution de tracts publicitaires, les annonces non motivées dans les journaux, les encarts publicitaires, là ou dans les annuaires, et le médecin "doit veiller à l'usage qui est fait de son nom, sa qualité ou ses déclarations" et "se garder de toute attitude publicitaire" ( art. 13 et 20 ). Le deuxième alinéa de cet article fait référence à la signalisation des locaux. Normalement le médecin peut avoir deux plaques professionnelles, l'une sur l'immeuble et l'autre à la porte du cabinet ; leur libellé doit respecter les obligations de l' article 81 . Il arrive que le cabinet médical (dans une résidence, dans une cour intérieure) soit difficilement accessible sans complément d'information. Une signalisation complémentaire est autorisée sous forme de pancarte ou panonceau indiquant la direction du cabinet à la porte duquel figure la plaque proprement dite. L'appréciation des dispositions locales peut être difficile et l'avis du conseil départemental pourra être utilement sollicité. Dans les lieux de vacances où une population migratrice séjourne temporairement (stations balnéaires ou de ski), ces indications se révéleront utiles mais doivent faire l'objet d'une concertation avec le conseil départemental (qu'il y ait un ou plusieurs cabinets médicaux, surtout s'il existe un groupe médical et des médecins autonomes). C'est dans ces mêmes contextes que pourrait être autorisée une signalisation incluse dans un panneau général d'informations aux résidents. Seul l'intérêt de la population doit être pris en compte.